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Abidjan "côté cours": pour comprendre la question de l'habitat

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(1987)

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    9 years ago
    Presentation de L’ouvrage : Abidjan, qui est probablement la deuxième cité ouest-africaine après Lagos, présente tous les caractères d'une véritable métropole. L'agglomération bimillionnaire, composée de 10 communes dont la surface totale atteint 54 000 ha, dont 8 700 ha d'étendues lagunaires, regroupe plus du cinquième de la population de Côte- d'Ivoire, concentre plus de la moitié du revenu monétaire national et fournit environ 70 % de la valeur ajoutée des secteurs secondaire et tertiaire dits « modernes », c'est-à-dire inventoriés et mesurés. C'est donc à l'examen des stratégies et des jeux d'alliance qu'il faut s'attacher, tant il est vrai que le blocage du projet, le détournement des programmes de logement économique et les processus d'exclusion de la plupart des citadins de la ville du modèle sont indissociables de la logique des choix effectués et de la question de la rente urbaine. Ph. ANTOINE, A. DUBRESSON, A. MANOU-SAVINA LE FAIT URBAIN ABIDJANAIS CHAPITRE I La question de l'habitat du plus grand nombre est liée à l'afflux massif et permanent de migrants, venus non seulement de toutes les régions de Côte-d'Ivoire, mais aussi des États limitrophes, Burkina Faso, Mali, Guinée, Ghana, et de la plupart des pays d'Afrique occidentale. En 1978, on ne dénombrait que 35 % de natifs de la ville parmi les résidents, dont une majorité d'enfants ; et dont les fondements sont à rechercher dans les mécanismes successifs d'appropriation et de mise en valeur de l'espace ivoirien. Il n'est pas possible de comprendre le phénomène abidjanais sans se référer, d'abord, à l'héritage colonial et à la mise en place de structures que les choix effectués à l'indépendance ont contribué à dynamiser. LE PROJET URBAIN ET SON ÉVOLUTION CHAPITRE II Dans la stratégie d'exploitation des territoires coloniaux, les villes remplissent des fonctions spécifiques : elles sont une condition de l'exploitation économique et l'instrument de la domination politique. Cette logique est d'abord affirmée par la création d'un réseau de postes militaires et commerciaux jalonnant les principales voies d'évacuation des produits vers l'Europe. Avec l'installation de l'Administration et l'arrivée des cadres de la métropole, une nouvelle structuration de l'espace urbain s'impose, dans les villes existantes comme pour la construction des nouvelles cités. L'organisation du tissu urbain, qui se résumait à l'idée d'un ordonnancement général de la population autour de l'emblème du nouveau pouvoir (chef de poste ou administrateur de cercle), ainsi que l'habitat des premiers colons, qui ne se distinguait guère de celui des Africains, font progressivement l'objet de réglementations particulières (1), dont l'ensemble constitue un véritable projet urbain. La cohérence et l'évolution de ce dernier renvoient à trois questions fondamentales : pourquoi, pour qui et comment faire la ville ? Après avoir tenté d'éclairer la première interrogation en cor- rélant le fait urbain abidjanais à l'héritage colonial et aux choix économiques opérés par le pouvoir d'État lors de l'indépendance, nous chercherons à répondre aux deux autres en analysant l'histoire de la politique urbaine. LE PEUPLEMENT ET LA VILLE DES COURS CHAPITRE III Abidjan, qui ne comptait que 17 000 habitants en 1934., a connu une fulgurante croissance après l'ouverture du canal de Vridi : 65-000 habitants en 1950, 125 000 en 1955, 951 000 en 1975, probablement plus de 2 millions en 1986. De 1935 aux années soixante-dix, le rythme de croissance s'est maintenu à 10-11 % par an, soit en, moyenne un doublement de population tous les sept ans. Cependant, depuis le début des années quatre-vingt, la croissance démographique s'est fortement ralentie, avoisinant les 4 à 5 % par an (voir infra). Ce ralentissement résulte à la fois des conséquences de la mauvaise conjoncture économique et d'une nette diminution des flux migratoires vers la métropole abidjanaise. Aucun élément ne permet, pour l'instant, de savoir si ce changement est purement conjoncturel, traduisant ainsi une grande sensibilité des flux démographiques à l'activité économique et laissant donc prévoir un renouveau des migrations vers Abidjan aux premiers signes d'une reprise économique. Il est fort possible également que cet infléchissement soit plus structurel, et que dans l'avenir la croissance de la population soit plus lente. Si le croît démographique de la ville reste supérieur à celui de l'ensemble du pays (3,5 %), il devient toutefois plus faible que celui des autres centres urbains de Côte-d'Ivoire (6,5 %), traduisant une nouvelle orientation des mouvements migratoires depuis 1980. Le peuplepment rapide et une croissance continue sur une longue période, procédant d'un afflux de migrants dont une forte proportion est étrangère, constituent des données majeures de la question de l'habitat du plus grand nombre, qui pèsent nécessairement sur le devenir du projet urbain. conclusion L'exceptionnel effort engagé à Abidjan par les dirigeants ivoi¬riens pour mettre en œuvre un projet urbain moderniste aboutis¬sant à l'élimination de l'habitat produit hors des normes définies par les pouvoirs publics n'a pas engendré, loin de là, la dispari¬tion d'un habitat de cour qui regroupe toujours la grande majo¬rité des citadins. Cette distorsion entre la réalité et les attendus des choix effectués ne résulte pas seulement des difficultés à gagner la course de vitesse engagée contre l'impressionnante croissance démographique et d'un problème de mobilisation des moyens finan¬ciers. Certes, le tarissement de ceux-ci au début des années quatre- vingt et la durée de celle-là depuis 1950 ont pesé sur le décro¬chage entre l'offre publique et la demande du plus grand nombre comme sur le devenir du projet. Mais il est clair que la logique des choix opérés et les pratiques d'attribution des éléments com¬posant l'« endroit » du modèle urbain étaient contradictoires avec les objectifs affichés : l'adoption de normes d'équipement élevées à fonctionnement onéreux, le laisser-faire, l'octroi de privilèges et l'appropriation de rentes par les catégories sociales aisées et moyen¬nes ont concouru à l'exclusion de la majorité des citadins des loge¬ments publics dits sociaux. Comme celles des logements économi¬ques, les attributions de parcelles ont constitué un moyen d'élar¬gissement de la clientèle du pouvoir d'État : la politisation du système d'attribution, les faveurs consenties aux membres de l'administration et des nouvelles catégories sociales « moyennes », car les investissements publics de restructuration bénéficient plus à la minorité des propriétaires qu'à la majorité des locataires. Toute la question est de savoir si, en réalité, la nouvelle politique urbaine ne traduit pas la recherche d'une forme d'alliance renouvelée entre un État soumis à de sévères contraintes financières et des catégories moyennes durement ébranlées pendant la « conjoncture » : si tel est le cas, l'habitat de cour, restructuré ou non, demeurera pour longtemps la forme dominante de l'urbanisation abidjanaise. Ce contexte pourrait faciliter l'adoption de normes moins sévères et l'intégration des cours communes dans une nouvelle politique urbaine, non sous leur forme de caravansérail surpeuplé et sous- équipé servant de base à la rente locative, mais en tant qu'habitat conforme aux exigences de salubrité et de confort. Une telle option implique un renversement significatif des choix, nécessaire pour sortir de l'impasse actuelle.
  • @acm
    9 years ago
    Abidjan « côté cours », "Rédigé collectivement, par Ph Antoine, A Dubresson et A. Manou-Savina cet ouvrage procède d’une rencontre et de nécessités. La rencontre est celle de trois chercheurs ayant longtemps arpenté différents quartiers d’Abidjan et qui ont décidé de mettre en commun des connaissances accumulées, par eux comme par d’autres, pour tenter de comprendre la genèse, le développement et la signification de la ville" qu’ils vont appeler : "la ville des cours". Aussi, les auteurs vont porter un regard critique sur la ville des cours d’où dès l’introduction ce constat paradoxale avertissant : « souvent présentée dans les écrits et les discours officiels comme la "perle des lagunes"» à cause de l’attachement trompeur sur le "Petit Manhattan" du plateau, Abidjan est pourtant restée et est surtout la ville des "cours communes" sous entendant une part belle à l’habitat de la catégorie « populaire ». Toujours dans l’introduction les auteurs annoncent ce qui sera tout au long du livre le cœur de leur démarche c’est-à-dire la réponse à la question : « pourquoi le projet et le modèle urbains rapidement mis en place par un État ivoirien disposant d’importants moyens, dont le principal objectif était de promouvoir un habitat social moderne pour la majorité des citadins, n’a-t-il pas donné les résultats escomptés » ? Ces thématiques ainsi annoncées sont développées à travers trois grandes parties constituantes du livre. La première partie intitulée : le fait urbain abidjanais relate successivement dans son premier chapitre : les fondements de la croissance d’Abidjan : l’héritage colonial, le contexte politico-économique du choix d’une capitale, l’explosion après 1950 ; puis en titre II : les choix fondamentaux de l’indépendance et leur mise en œuvre. Ici sont présentés les éléments du choix « du model ivoirien » qui se caractérisent en une « marche forcée » à la croissance rapide se reposant sur l’agriculture d’exportation « pour favoriser le démarrage d’une industrialisation tournée vers le marché intérieur ». Quand on sait qu’appliquer les idées conçues ailleurs notamment en occident est l’une des causes majeures d’échec des politiques en Afrique alors, c’est donc à juste titre que les auteurs et d’autres qui sont cités par ces derniers, reconnaissent dans ce choix des autorités ivoiriennes une certaine « conduite des stratégies autochtones » …., auxquelles « on ne peut dénier la qualité d’avoir été avant tout des choix ivoiriens qui ne procèdent nullement d’une simpliste soumission imposée de l’extérieur ». C’est alors à juste titre que ce model ivoirien va bien fonctionner tel que les auteurs le ressortent dans le dernier titre (titre III) clôturant ce premier chapitre intitulé : l’explosion urbaine et la question de l’accumulation différentielle à Abidjan. C’est ici qu’est signalé le problème à la base de l’étalement des villes africaines : l’immigration intense et complexe. Abidjan verra doublée sa population tous les sept ans et, comme il est reproché à l’Afrique, il y a eu explosion urbaine, explosion de l’envers du petit Manhattan (de cours communes) à cause d’un manque de planification urbaine prévoyant la gestion des flux humains. Dans le deuxième et dernier chapitre de cette première partie, les auteurs nous emmènent dans le projet urbain colonial et son évolution (titre du chapitre). D’abord, tel que le témoigne aujourd’hui la structure des villes coloniales en Afrique, les Africains sont au départ exclus de la ville, repoussés de plus en plus notamment au fin de protéger la communauté coloniale des maladies des africains. D’où l’apparition des premiers arrêtés concernant l’organisation des voiries, des dépotoirs, du programme d’hygiène, les plan de lotissements… dans le cadre de ce dernier, le premier « plan de lotissement du village de Kokody (actuel Abidjan), situé sur le Plateau, est mentionné dès 1905 dans les demandes de concession publiées au JOCI ; Dès 1914, une partie du plan de lotissement de l’île de Petit-Bassam est approuvée ; en 1912, un arrêté fixe la superficie des terrains de 250 à 2 375 m2 pour le lotissement du Plateau d’Abidjan ; un autre arrêté délimite en 1934 la superficie des parcelles du Terre-plein Commercial à 1 000 m2 et celles de la zone résidentielle à 1 500 m2 » ; ainsi naissent et s’organisent les outils qui feront le projet Abidjan. Ce projet urbain ivoirien après l’appropriation des autorités d’après l’indépendance, évolue dans le titre II de ce deuxième chapitre en termes nouveaux : « de l’habitat africain, on passe à l’habitat pour tous les Ivoiriens, dans toutes les villes et pour tous les quartiers ». C’est ici, tout le sens du cours sur la planification urbaine de Jérôme Chenal quand il recommande à l’heure de planifier, de se poser la question : pour qui on fait la ville ? Pour quel type de personne ? Qui aura quel revenu et qui a quelles pratiques sociales ? De faire de telle sorte que le modèle économique choisi puisse se développer ensemble, harmonieusement avec l’urbanisation. Ainsi, la distorsion entre le modèle ivoirien et la réalité sur le terrain est signalée très tôt par les premières enquêtes après l’indépendance (page 82). Cette distorsion se lit dans « les choix économiques effectués à l’indépendance qui ont des implications évidentes en matière d’habitat et d’urbanisme. Ils renforcent le poids démographique de la capitale, et c’est d’abord là qu’est posée avec acuité la question de l’habitat du plus grand nombre. Ils s’accompagnent d’un afflux de main-d’œuvre d’origine rurale aux revenus faibles, à la fois ivoirienne et étrangère, provenant des pays limitrophes à la croissance économique moins spectaculaire. Ils engendrent l’appel à une assistance technique étrangère, en majorité française, aux revenus élevés, très urbanisée, et attachée à un modèle urbain calqué sur les normes occidentales. Le choix du modèle libéral et du maintien de la dépendance utilisés comme stratégie pour accéder au développement économique a donc, a priori, pour conséquences de reproduire et d’amplifier les blocages … ». Comme il faut s’y attendre dans ces genres de situation, les blocages que rencontre le modèle ivoirien occasionnent le "gaspillage" des moyens, entrainant l’appel des fonds extérieur qui eux et l’espoir suscité par la découverte des gisements de pétrole ne pourront tenir devant une planification urbaine presque inadaptée ; ne pouvant résister devant la réalité, les puissances des pratiques sociales maîtres sur le terrain qui feront fléchir même la banque mondiale qui s’est retrouvée en contradiction avec ses propres principes dans l’un de ses projets entrant dans le cadre de l’urbanisation d’Abidjan. La deuxième partie du livre, parle du peuplement de la ville des cours, le chapitre 3 qui l’inaugure traite du peuplement de la métropole à travers les sous titres comme : les ivoiriens à l’assaut de leur métropole (titre 3) ; les étapes de la croissance spatiale (titre 4) ; population et habitat dans l’espace abidjanais ; l’arbitraire des typologies d’habitat … C’est le chapitre 4, le deuxième de la partie qui nous parle de l’habitat de cour qui a donné son nom au livre. L’analyse globale du fait urbain abidjanais révèle une distorsion entre le projet officiel et la réalité, puisqu’en 1985 70% environ des citadins vivent dans l’habitat de type cour, qui constitue toujours l’habitat du plus grand nombre. En ce sens, le projet urbain ivoirien se laisse définir aussi bien par ce qu’il affirme et impose que par ce qu’il rejette et néglige. « Endroit et envers » du projet opposent ainsi un espace produit par 1’Etat et répondant au modèle défini par ce dernier et un espace légal ou illégal, mais où le cadre-bâti et la façon d’habiter n’ont rien à voir avec le modèle choisi. Le titre suivant : Une production foncière sous le signe de l’urgence, essaie de démontrer ce qui précède en stipulant que la ville des cours est le produit de trois processus d’accès au sol urbain : - un processus légal par l’accès au lotissement administratif ; - un processus illégal par l’accès à un lotissement privé entrepris par les propriétaires coutumiers ; - un processus illégal par l’installation hors lotissement privé ou public, sur des terrains insalubres ou sur des espaces laissés libres dans le tissu urbain existant. La ville légale des cours est celle des lotissements administratifs, qui ont pour origine les lotissements sommaires… Les trois processus, qu’ils soient légaux ou illégaux, ont en commun de répondre au problème-du logement du plus grand nombre dans des délais très rapides. I1 en résulte la création d’espaces urbains où l’investissement initial est inexistant ou minime : simple trame de voirie et délimitation sommaire des parcelles où aucun équipement n’est apporté. Les espaces créés au coup par coup se juxtaposent ; dans un même quartier, la trame urbaine présente ainsi de nombreuses discontinuités : alignements différents d’un espace à l’autre, d’où des connexions difficiles à réaliser après coup, présence de friches, de marécages ou de terrain de cultures, parcellaire non uniforme variant selon l’origine de l’occupation et du lotissement… La troisième et dernière partie du livre parle des stratégies à l’œuvre se déclinant dans :  La Fonction d’intéressement et Elargissement de la base sociale de l’Etat à travers la régulation des contradictions : l’insertion des cours et les Enjeux et ;  Les propriétaires face à la politique urbaine à travers l’enjeu foncier des propriétaires coutumiers-lotisseurs ; la transformation d’une rente agricole en rente urbaine ; l’enjeu foncier des candidats aux terrains à bâtir : la perception ; les limites de la fonction du laisser-faire. En conclusion : L’exceptionnel effort engagé à Abidjan par les dirigeants ivoiriens pour mettre en Œuvre un projet urbain moderniste aboutissant à l’élimination de l’habitat produit hors des normes définies par les pouvoirs publics n’a pas engendré, loin de là, la disparition d’un habitat de cour qui regroupe toujours la grande majorité des citadins. il est important de souligner que les déboires des autorités ivoiriennes de l'époque et leurs erreurs dans la planification urbaine sont restés les mêmes jusqu'à aujourd'hui, on ne planifie toujours pas en tenant compte de la réalité sur le terrain, sa ns tenir compte de tous les centres d’intérêts... Les autorités africaines n'ont point tirés des leçons dans le domaine de la planification urbaine. Tous ce que dénonce et recommande le cours de Jérôme Chenal dans le MOOC sur la ville africaine (ecole polytechnique de Losane, MOOC ville Africaine) a tout son sens pour tirer les leçons de ce livre.
  • @noeleon
    9 years ago (last updated 9 years ago)
    En 1988 Philippe Antoine, démographe a l'IRD, Alain Dubresson et Annie Manou-Savina, géographes de formation, écrivent «Abidjan, cote cours. Pour comprendre la question de l'habitat», ORSTOM (Office de la recherche scientifique et technique outre-mer); Karthala, 1987; (Hommes et Sociétés), avec le but d'analyser la question de l'habitat dans la ville ouest-africaine d'Abidjan, surnommée «la perle des lagunes» dû à son emplacement géographique particulier. En 1987, sept Abidjanais sur dix habitent dans un logement type cour commune, ce qui montre que la réalité de la ville ne correspond pas au projet urbain moderne d'inspiration occidentale implanté par le gouvernement de la période post-coloniale. Pourquoi / pour qui / comment a été faite la ville? La Côte d'Ivoire obtient l'indépendance de la France en 1960 et l’État doit faire face à deux questions majeures: l'augmentation du taux de croissance du nombre des nouveaux habitants et l'inadaptation du bâti au service d'un développement harmonieux pour la totalité de la population. Pendant les années 30, Abidjan avait accueilli une grande masse d'européens, installés en Cote d'Ivoire, quittant la capitale, Grand-Bassam, à cause de l’insalubrité et de la propagation d'épidémies. Abidjan répond aux principes communs des villes coloniales: la ville suivant une maille pour assurer le contrôle politique et administratif, hiérarchie et ségrégation des habitants en séparant Plateau, le quartier administratif et résidence des européens, des quartiers populaires «africains». Le développement du chemin de fer et l’aménagement du port va provoquer la migration et l'implantation des travailleurs venus d'autres régions du pays ainsi que d'autres pays africains et la création des nouveaux lotissements pour les loger. En 1952 le Plan Badani met en valeur un programme d'habitat social “salubre et avec accession à la propriété individuelle”. Entre les types de logements proposés, le modèle choisi pour héberger les travailleurs saisonniers et la population informelle sera le caravansérail, dans lequel on retrouve des logements individuels et des services collectifs. C'est le début de la ville des cours. A partir de 1960 le virage vers des principes économiques tel que l'agriculture d'exportation et l'ouverture vers l’extérieur provoquent une croissance de population inattendue (supérieure au 10% annuel) et une croissante demande de logements. L’État répond à travers la création de nouveaux lotissements, l'amélioration des quartiers (assainissement, drainage, aménagement de la voirie) et la construction d'équipements (WC publics, marchés, etc). Pendant les années suivantes l'Administration publique se réserve le monopole du contrôle foncier et intervient dans les quartiers existants utilisant diverses opérations de restructuration et rénovation. La ville des cours L'apparition d'un type d'habitat nommé «évolutif» (évolution possible par l’addition des nouveaux bâtiments au sein de la cour ou bien de nouveaux niveaux sur les toitures en terrasse) essai de répondre à un double processus de densification progressive des quartiers et à une possibilité d'adaptation à des nouvelles situations sociales. Avec une superficie et une forme variables (dépendant de la parcelle) et fréquemment placé dans des espaces laissés libres dans le tissu urbain existant, cette cour commune est formée par une partie construite (logements et dépendances) et un espace libre généralement au centre. «Le populaire est dans la cour, mais toute la cour n'est pas populaire». La qualité de la construction, les matériaux utilisés, ainsi que les services disponibles dans la cour commune dépendent de l'ancienneté, des réseaux présents au niveau du quartier (branchement d'eau, électricité), de la légalité de l’hébergement, etc. ce qui induit une grande diversité culturelle et géographique des habitants. Ville des cours vs ville des tours En référence au «petit Manhattan» construit au sein du quartier européen pour mettre en évidence le sens dualiste de la ville. «Au-delà des disparités criantes mais néanmoins communes aux paysages urbains de toutes les grandes métropoles, cette image duale de la ville ne rend pas compte de la nouvelle société qui l'habite. De par sa taille, son ancienneté et son rôle politique et économique, la ville a acquis un dynamisme démographique et sociologique propre. Cosmopolite et macrocéphale, Abidjan reste liée à son vaste hinterland, mais l'émergence de nouvelles catégories sociales montre qu'elle s'en est affranchie». Tissu urbain, tissu social: stratégies antagonistes d'occupation de l'espace à Abidjan. Myriam Armand
  • @sidibakus
    9 years ago
    Les villes africaines à l’instar d’Abidjan, en Côte d’Ivoire, après les années d’indépendance, ont été confrontées à de multiples défis. L’un de ces défis a été l’instauration d’une politique urbaine, qui connait jusqu'à ce jours des difficultés à atteindre les résultats escomptés. C’est donc, dans l’objectif de proposer une analyse critique de ces difficultés, que l’ouvrage intitule « Abidjan « coté cours » pour comprendre la question de l'habitat de Ph. ANTOINE - démographe ; Alain DUBERSON et A. MANOU SAVINA tous deux géographes, » ; à travers cette problématique : pourquoi le projet et le modèle urbains rapidement mis en place par un État ivoirien disposant d’importants moyens, dont le principal objectif était de promouvoir un habitat social moderne pour la majorité des citadins, n’va-t-il pas donné les résultats escompté, la ville des cours regroupant toujours la plupart des familles abidjanaises vingt-cinq ans après l’indépendance ?, tient tout son sens. La question du logement Dans les quartiers d’habitation des colons, quartiers centraux densément bâtis, s'oppose schématiquement l'immensité de zones résidentielles aisées ou populaires, dont le seul point commun est l'horizontalité de l'habitat, dévoreuse d'espace. La disparité des parcs de logement y rend visible l'ampleur des inégalités et de la pauvreté du plus grand nombre, sous plusieurs formes divergentes et imbriquées qui témoignent d'une fragmentation urbaine ancienne et qui s'aggrave : développement de poches de bidonvilles dans les interstices des villes les plus modernes, parfois même à proximité immédiate, ou quartiers de classes moyennes paupérisées. Dans presque tous les cas, face à des taux de croissance élevés, Abidjan est caractérisé par un manque de logements qui soient à la fois dotés d'un confort minimum et accessibles aux bas revenus. Le facteur classiquement évoqué est l'absence ou l'insuffisance grave des programmes publics de logements sociaux, ainsi que le clientélisme dans l'attribution de ces logements. Mais il ne faut pas oublier que la pauvreté du plus grand nombre, qui entraîne l'insolvabilité, explique aussi l'insuffisance quantitative de la promotion immobilière privée locative de qualité. Lorsqu'il ne se spécialise pas dans les immeubles de grand luxe destinés aux enrichis de l'émergence économique, le secteur locatif privé ou mixte est réservé aux ménages (minoritaires) pouvant se targuer d'un revenu stable (salariés), ou alors se spécialise dans le taudis. L’ouvrage aborde la question de l'habitat et l'accès au principal service de base. Pour évaluer concrètement les problèmes et analyser la politique des principes de la gestion urbaine à travers l'étude des problèmes concrets du quotidien de citadins. Les auteurs proposent donc un schéma explicatif général de la crise du logement et du développement de la ville. A travers la situation particulière des « cours communes ». Les cours communes sont des concessions regroupant plusieurs logements (d’une pièce voire deux dans la plupart des cas) louées par leurs propriétaires à des tiers. A Abidjan, on retrouve les habitations de ce modèle dans les communes peuplées telles qu’Abobo, Yopougon, Attécoubé, Port-Bouët et Koumassi, pour ne citer que ceux-là. Au départ, les cours communes étaient faites pour les transfuges de l’exode rural et les immigrés des pays voisins qui avaient pour eldorado, la capitale économique ivoirienne. Mais la crise du logement, la démographie galopante et la paupérisation sont autant de facteurs qui vont très vite changer la donne. Les ménages à faible ou moyen revenus vont eux aussi se tourner vers ces logements à bas coûts qui offrent en réalité peu de commodités, sinon pas souvent. Ainsi, naissent de nouveaux modes de vie et de pensée avec pour dénominateur commun, le partage. Des formes d'habitat locatif populaire « cours communes » La pauvreté majoritaire, depuis des décennies tend partout à s’accroître, avec une paupérisation des anciennes classes moyennes (licenciements liés à la désindustrialisation, compressions d'effectifs de fonctionnaires, dévaluations monétaires qui réduisent à néant salaires et retraites). Enfin, il est un troisième facteur de convergence des problématiques : c'est l'homogénéisation récente des politiques urbaines dans toutes les grandes villes des PVD, sous la pression internationale. Celle-ci est liée aux politiques d'ajustement structurel, (restrictions budgétaires et rationalisation de la gestion publique) imposées par le FMI aux pays surendettés, et qui furent l'occasion d'ouvrir les yeux sur les “ externalités négatives ”, les dysfonctionnements des équipements, les surcoûts induits par leurs carences, l'état de faillite des opérateurs de services. Ainsi, s'il existe une hiérarchie dans la pauvreté, la « cours commune » permet aux moins pauvres des très pauvres de se loger “ en dur ” lorsqu'existe une offre locative bon marché. Il est d'usage courant de réserver le terme de “ taudis ” à un habitat collectif dégradé et/ou sans confort, où la taille moyenne des logements est inférieure à deux pièces, avec un taux d'occupation excessif et des sanitaires communs à plusieurs ménages. Mais chaque ville possède sa terminologie vernaculaire, liée à l'histoire, aux formes culturelles de l'habitat, aux formes économiques de sa production, et il est donc bien préférable d'utiliser les termes locaux, plus précis : cours communes. Les “ cours communes” des denses quartiers centraux ou péri centraux d'Abidjan peuvent aussi être rattachées à cette catégorie, surtout quand la “ cour ” proprement dite se transforme en un simple couloir, que l'occupation de l'espace se sur-densifie : “ dans les modules de base de 400 m2, le nombre moyen d'habitants par parcelle est passé, entre 1955 à 1978 de 21,5 à 42,5 à Treichville”. Il s'agit là, d'une “ petite production immobilière ” destinée au rapport. À Abidjan, dans les années 80, les pouvoirs publics, incapables de produire ou subventionner les logements nécessaires aux bas revenus, ferment facilement les yeux sur le caractère parfois illicite des achats ou des mises en location. Les propriétaires sont en majorité des salariés du secteur moderne (surtout le privé). Comme l'impôt foncier est à la fois peu élevé et très mal recouvré, leur rente locative est quasiment nette de prélèvements, et l'amortissement d'une construction est réalisé entre 2 et 5 ans ! Aux loyers s'ajoutent les sommes tirées de la revente d'eau et d'électricité : “ des investissements relativement faibles permettent de loger un maximum de personnes, l'État trouvant ainsi une solution à l'habitat du plus grand nombre” Invasions et régularisations foncières La mobilité vers la périphérie constitue souvent la seule possibilité des pauvres pour se loger durablement à moindre coût qu'une location, en accédant à la propriété d'une parcelle à bâtir. L'accès au sol est relativement aisé dans la plupart des grandes villes d'Afrique subsaharienne, notamment par le biais de transactions coutumières ou amiables qui, si elles ne sont pas toujours “ légales ” se font au moins par accord des deux parties. Que les terrains soient acquis légalement ou occupés de façon illicite puis régularisés, l'aspect architectural de ces quartiers de périphéries pauvres est assez semblable dans toutes les communes dites populaires. Quand bien même ils seraient solvables, les citadins ayant des emplois précaires dans le secteur informel n'ont pas accès aux prêts bancaires ou publics qui permettent l'achat d'un logement bâti et équipé selon des normes modernes. La masse des ménages à bas revenus désireux de se stabiliser n'a donc d'autre recours que l'autopromotion d'un habitat en dur rudimentaire qui tend à ce modernisé à l’ivoirienne. Ce processus explique le paysage particulier, commun aux marges plus ou moins viabilisées. C'est ainsi que dans nombre de commune, le fait d'être propriétaire d'un “ logement individuel ” n'est généralement pas un indicateur de richesse. Construire sa maison est souvent l'affaire d'une vie, à la fois investissement pour l'avenir (revente, petit commerce, location, accueil de parents etc..) et valeur symbolique. Cependant, les occupants construisent rarement de leurs propres mains, c'est même rare. Pour l'essentiel, ils font appel à l'artisanat informel de la construction, qui est l'un des principaux pourvoyeurs d'emplois dans ces quartiers. Les chantiers peuvent être interminables, puisque les phases incontournables de gros travaux (monétarisés) nécessitent une longue période d'économies. Il y a souvent montage d'une baraque temporaire, puis d'une maison sommaire mais en dur, améliorée si le statut foncier se stabilise, puis l'édification d'un étage ou de pièces supplémentaires permettant de tirer un revenu locatif. Cette stratégie contrainte est parfois soutenue par des programmes publics (aidés par des bailleurs de fonds internationaux) de parcelles semi-viabilisées en accession à la propriété, ou “ trames assainies ” dotées des principales infrastructures. Ce faisant, les municipalités prennent acte de la capacité d'autopromotion populaire tout en cherchant à améliorer la qualité des quartiers ainsi produits. Nouvelles donnes, nouveaux principes du gouvernement de la ville : Aujourd'hui, on assiste à une redéfinition complète et énergique de la manière dont sont pris en charge les services collectifs, sous l'effet, notamment, des injonctions de la Banque mondiale et des principes de la gouvernance. Le principe de gouvernance prône la coordination des différents acteurs entre eux et l'implication des citoyens dans la gestion de la ville. Il implique l'établissement de nouveaux partenariats et une redéfinition des règles et des principes de l'action publique : autonomie plus grande des collectivités locales à l'égard de l'État (décentralisation), partenariat entre les pouvoirs publics et le secteur privé, banques, entreprises, prestataires de services urbains (gestion déléguée, privatisation des services collectifs), coopération entre communes d'une même agglomération ou aire métropolitaine (intercommunalité), démocratie locale participative. Si l'on peut se réjouir du dynamisme d'acteurs privés émergents, la question de la péréquation de la ressource est bien posée : l'eau, l'assainissement coûtent plus cher si l'on vit en lointaine périphérie, alors : à chacun selon ses besoins, ou selon ses moyens ? Le droit aux services de base pour tous ne constitue-t-il un bon indicateur de développement équilibré des grandes villes ? Au terme de note lecture, nous retiendrons que le model d’urbanisation de la Côte d’Ivoire enclenchée par la colonisation fût d’abord repenser après l’indépendance et mise en mal en grande partie par l’exode rural et l’immigration avec un développement des pratiques sociales dans les centres urbains qui sont destructrices de la façon de concevoir la ville par les urbanistes. L’informel et la façon d’habiter se développent au détriment des normes et politiques urbaines mise en place en créant une cité compacte. Tel peut se présenter le défi majeur de la gestion urbaine : mettre en place les péréquations nécessaires à une équité spatiale dans un contexte où les disparités sociales restent énormes. Nous rejoignons les auteurs qui affirment avec force que “ Toute la question est de savoir si, en réalité, la nouvelle politique urbaine ne traduit pas la recherche d’une forme d’alliance renouvelée entre un État soumis à de sévères contraintes financières et des catégories moyennes durement ébranlées pendant la « conjoncture » : si tel est le cas, l’habitat de cour, restructuré ou non, demeurera pour longtemps la forme dominante de l’urbanisation abidjanaise. Ce contexte pourrait faciliter l’adoption de normes moins sévères et l’intégration des cours communes dans une nouvelle politique urbaine, non sous leur forme de caravansérail surpeuplé et sous- équipé servant de base à la rente locative, mais en tant qu’habitat conforme aux exigences de salubrité et de confort. Une telle option implique un renversement significatif des choix, nécessaire pour sortir de l’impasse actuelle. ” Ce qui est en jeu, c'est bien aussi une dimension politique : la capacité de contre-pouvoirs urbains à imposer un “ partage de la ville ”, c'est à dire la construction d'une citoyenneté urbaine universelle, nécessairement articulée à des États de droit via des démocraties locales et nationales.
  • @sergeoloumou
    @sergeoloumou 9 years ago
    Dans le souci de comprendre certains choix opérés par l’Etat ivoirien après son indépendance, notamment les choix en matière de politique urbaine donc l’un des objectifs principal visait la promotion d’un habitat moderne pour la majorité des citadins de la ville d’Abidjan, une question pertinente a motive la démarche des auteurs du livre intitule « Abidjan « coté cours » ». En effet Ph. ANTOINE ; Alain DUBERSON et A. MANOU SAVINA respectivement démographe pour le premier et géographes pour les deux autres, s’interrogent pourquoi un quart de siècle après cette volonté affichée par le gouvernement de la Cote D’Ivoire, les résultats escomptées n’ont pas été produit. Les trois auteurs essayent de décrire de manière pertinente le processus de formation d’Abidjan depuis la période coloniale jusqu'à l’après indépendance. On note que la construction ou l’urbanisation de la ville Africaine passe par la compréhension ou mieux la maitrise de certains aspects fondamentaux de l’urbanisation en l’occurrence les questions d’habitat et celle du foncier. Il est donc retracer entre et autres les conditions de la croissance de la « perle des lagunes », son développement, sa démographie et sa structuration, on apprend ainsi que cette ville peut être vue sous trois angle, la ville coloniale, la ville portuaire, et le nouveau périmètre qui lui est le produit d’une croissance urbaine soutenue. L’habitat dit de cour étant présentée ici comme moyen de logement de la majorité de la population urbaine à bas et moyens revenus. Enfin la réalité des pratiques sociales des populations sur le terrain fait constater clairement les limites du choix ivoirien et les stratégies visant à redéfinir les modes de distributions des services urbains sont clairement proposées. Il nous parait intéressant de revenir sur certaines questions fondamentales que se sont posées les auteurs : pourquoi, pour qui et comment faire la ville ? réexplorer ces questions nous semble pertinent au vu de nombreux éléments de réponses contenu dans ce livre. Si l’on considère la ville comme un espace où se rencontrent les hommes et leurs activités, la contrainte de vivre ensemble leur impose une nécessite d’aménagement de cet espace pour faciliter ou concentrer ainsi leurs activités qui peuvent être l’habitat, le commerce, l’industrie, la politique et bien plus. Abidjan importante ville d’Afrique de l’ouest n’échappe pas a cette volonté de créer une agglomération cosmopolite dont la forte croissance économique observée déjà des les années 1950 a favoriser une certaine explosion urbaine même si les fruits de cette forte croissance semble être inégalement reparties. Le développement des activités liées en premier à la fonction portuaire d’Abidjan a entrainé la naissance d’un important marché du travail vers lequel afflue une masse considérable de ruraux, nationaux et étrangers. Apparait donc ce que l’auteur appelle « le modèle ivoirien », qui va accélérer le processus d’urbanisation de la ville des lagunes. Ainsi comme le relève l’auteur : « l’armature urbaine ivoirienne peut apparaitre, schématiquement, comme un réseaux de lieux intermédiaires entre les aires de production agricole et l’exutoire principal que constitue le port d’Abidjan, les inégalités de croissance relevant alors essentiellement de l’évolution des modalités de l’échange : Villes de la foret dynamisées par l’environnement rural et l’économie de plantation, Villes du chemin de fer marginalisées par l’amélioration du réseau routier, concentration sur Abidjan des infrastructures principales et des services auxiliaires du grand commerce d’import-export. » La ville étant donc le lieu privilégié du marché de l’emploi on comprend mieux sa fonction attractive qui a d’ailleurs pour corolaire le drainage d’une population diverse en quête du numéraire. C’est de cette population qui se trouve être la majorité de ceux qui peuplent finalement la ville, que va dériver le problème du logement. L’habitat vue comme étant le mode d’occupation de l’espace par l’homme et l’ensemble des conditions qui défini cet espace, est la question centrale traitée par l’auteur. Si l’on considère donc des gens venus d’horizon divers aux modes de vie et habitudes différentes, et qui s’établissent ou se rencontrent sur un espace où ils doivent collaborer, il nous semble que cet espace sera de même que ceux qui s’y retrouvent, influencée par cette diversité. Si face a cette diversité des couches sociales, le politique privilégie d’une façon particulière l’économie au dépens de l’habitat social pour tous ce qui paraissait être le cas d’Abidjan, il apparait difficile de ne pas déboucher sur des questions d’informalité même en matière de logement car c’est l’ensemble des quartiers qui constitue la ville. Mais pouvait il en être autrement au vu du contexte historique de la Cote d’ivoire, pouvait-on prévoir suffisamment à l’ avance un développement humain d’une typologie particulière même malgré la volonté politique des autorités subjugués par la croissance économique d’antan et qui voulait d’une ville calquée sur des modèles européens. ? La réponse par l’affirmative ne nous semble pas très évidente surtout pour la Cote d’ivoire qui a connu un important flux de migrants étrangers, et même malgré certains essais de recadrage des bailleurs de fonds qui dans un premier temps n’ont pas reçu l’assentiment des autorités ivoiriennes ; mais qui plutard, a cause de la conjoncture économique ont opérés une réorientation de leur politique urbaine (plan quinquennal 1981-1985). On peux donc affirmer qu’on ne doit pas se baser toujours sur les caractéristiques communes des villes pour planifier, mais tenir compte aussi des caractéristiques spécifiques car chaque ville présente certains indices propre a elle qui font qu’elle soit différente des autres quelques part même si d’une manière générale la fonction de la ville est toujours la même. Pour faire une ville il faut prendre en compte un certains nombre de considérations techniques aussi bien présentées dans bons nombre de documents : choisir sa forme urbaine, penser les réseaux, les transports, l’énergie les déchets et eaux usées, et même d’autre considérations plus actuelles tel que la communication, internet. Construire une ville c’est aussi mettre en place les outils de planification disponible et prenant en compte toutes les composantes de la ville tout en se projetant sur un moyen et long terme. Mais le fait que planifier une ville soit aussi le résultat d’une imagination d’une conception d’un espace de vie amélioré pour le présent et le futur, l’évolution et les changements de notre univers actuel nous impose forcement des recadrages, des réorientations ou même des adaptations de nos politiques urbaines a un moment donné. En ce sens la démarche des autorités de la Cote d’ivoire qui visaient une ville d’un certain standing en matière de politique de l’habitat ne nous semble pas un mauvais choix, car un quart de siècle après, elle a procède a une réorientation de sa politique urbaine tout en prenant bien en compte l’habitat de type « cours » ; encore appelé par le langage populaire « cour commune » : il s’agit d’un espace différencié comportant une partie construite, bâtiment d’habitations et dépendances (sanitaires et cuisines), et un espace libre, généralement au centre de la parcelle appelé cour. Seulement la question foncière pour la pluparts des sociétés Africaines reste un épineux problème ou malgré un certain cadre juridique qui a du mal à être non seulement accepté de tous, pèche aussi gravement dans son application. La spéculation se fait de plus en plus bien au détriment des plus pauvres qui sont obligé de trouver eux même des solutions a leur problème de logement. On pourrait pour conclure dire que la planification d’une ville n’est pas une activité autonome, elle est bien aussi indépendante des facteurs politiques que des changements économiques. Le modèle ivoirien qui a accordé la prépondérance à Abidjan ou d’ailleurs une croissance remarquable s’est développée a favoriser l’émergence d’une typologie d’habitat répondant a un réel besoin. L’habitat de cours non comparable aux bidonvilles misérables de certaines citées latino-américaines ou asiatiques, est une belle illustration de ce que planifier c’est s’inscrire dans une vision d’avenir, vision qui doit être partagée par la communauté. Certes la question du droit a la ville est clairement posée ici, mais en analysant le contexte on ne peut pas faire beaucoup de reproches au modèle ivoirien qui a d’ailleurs eu le mérite de faire d’Abidjan l’une des villes les plus importantes de l’Afrique subsaharienne.
  • @sergeoloumou
    @sergeoloumou 9 years ago
    Dans le souci de comprendre certains choix opérés par l’Etat ivoirien après son indépendance, notamment les choix en matière de politique urbaine donc l’un des objectifs principal visait la promotion d’un habitat moderne pour la majorité des citadins de la ville d’Abidjan, une question pertinente a motive la démarche des auteurs du livre intitule « Abidjan « coté cours » ». En effet Ph. ANTOINE ; Alain DUBERSON et A. MANOU SAVINA respectivement démographe pour le premier et géographes pour les deux autres, s’interrogent pourquoi un quart de siècle après cette volonté affichée par le gouvernement de la Cote D’Ivoire, les résultats escomptées n’ont pas été produit. Les trois auteurs essayent de décrire de manière pertinente le processus de formation d’Abidjan depuis la période coloniale jusqu'à l’après indépendance. On note que la construction ou l’urbanisation de la ville Africaine passe par la compréhension ou mieux la maitrise de certains aspects fondamentaux de l’urbanisation en l’occurrence les questions d’habitat et celle du foncier. Il est donc retracer entre et autres les conditions de la croissance de la « perle des lagunes », son développement, sa démographie et sa structuration, on apprend ainsi que cette ville peut être vue sous trois angle, la ville coloniale, la ville portuaire, et le nouveau périmètre qui lui est le produit d’une croissance urbaine soutenue. L’habitat dit de cour étant présentée ici comme moyen de logement de la majorité de la population urbaine à bas et moyens revenus. Enfin la réalité des pratiques sociales des populations sur le terrain fait constater clairement les limites du choix ivoirien et les stratégies visant à redéfinir les modes de distributions des services urbains sont clairement proposées. Il nous parait intéressant de revenir sur certaines questions fondamentales que se sont posées les auteurs : pourquoi, pour qui et comment faire la ville ? réexplorer ces questions nous semble pertinent au vu de nombreux éléments de réponses contenu dans ce livre. Si l’on considère la ville comme un espace où se rencontrent les hommes et leurs activités, la contrainte de vivre ensemble leur impose une nécessite d’aménagement de cet espace pour faciliter ou concentrer ainsi leurs activités qui peuvent être l’habitat, le commerce, l’industrie, la politique et bien plus. Abidjan importante ville d’Afrique de l’ouest n’échappe pas a cette volonté de créer une agglomération cosmopolite dont la forte croissance économique observée déjà des les années 1950 a favoriser une certaine explosion urbaine même si les fruits de cette forte croissance semble être inégalement reparties. Le développement des activités liées en premier à la fonction portuaire d’Abidjan a entrainé la naissance d’un important marché du travail vers lequel afflue une masse considérable de ruraux, nationaux et étrangers. Apparait donc ce que l’auteur appelle « le modèle ivoirien », qui va accélérer le processus d’urbanisation de la ville des lagunes. Ainsi comme le relève l’auteur : « l’armature urbaine ivoirienne peut apparaitre, schématiquement, comme un réseaux de lieux intermédiaires entre les aires de production agricole et l’exutoire principal que constitue le port d’Abidjan, les inégalités de croissance relevant alors essentiellement de l’évolution des modalités de l’échange : Villes de la foret dynamisées par l’environnement rural et l’économie de plantation, Villes du chemin de fer marginalisées par l’amélioration du réseau routier, concentration sur Abidjan des infrastructures principales et des services auxiliaires du grand commerce d’import-export. » La ville étant donc le lieu privilégié du marché de l’emploi on comprend mieux sa fonction attractive qui a d’ailleurs pour corolaire le drainage d’une population diverse en quête du numéraire. C’est de cette population qui se trouve être la majorité de ceux qui peuplent finalement la ville, que va dériver le problème du logement. L’habitat vue comme étant le mode d’occupation de l’espace par l’homme et l’ensemble des conditions qui défini cet espace, est la question centrale traitée par l’auteur. Si l’on considère donc des gens venus d’horizon divers aux modes de vie et habitudes différentes, et qui s’établissent ou se rencontrent sur un espace où ils doivent collaborer, il nous semble que cet espace sera de même que ceux qui s’y retrouvent, influencée par cette diversité. Si face a cette diversité des couches sociales, le politique privilégie d’une façon particulière l’économie au dépens de l’habitat social pour tous ce qui paraissait être le cas d’Abidjan, il apparait difficile de ne pas déboucher sur des questions d’informalité même en matière de logement car c’est l’ensemble des quartiers qui constitue la ville. Mais pouvait il en être autrement au vu du contexte historique de la Cote d’ivoire, pouvait-on prévoir suffisamment à l’ avance un développement humain d’une typologie particulière même malgré la volonté politique des autorités subjugués par la croissance économique d’antan et qui voulait d’une ville calquée sur des modèles européens. ? La réponse par l’affirmative ne nous semble pas très évidente surtout pour la Cote d’ivoire qui a connu un important flux de migrants étrangers, et même malgré certains essais de recadrage des bailleurs de fonds qui dans un premier temps n’ont pas reçu l’assentiment des autorités ivoiriennes ; mais qui plutard, a cause de la conjoncture économique ont opérés une réorientation de leur politique urbaine (plan quinquennal 1981-1985). On peux donc affirmer qu’on ne doit pas se baser toujours sur les caractéristiques communes des villes pour planifier, mais tenir compte aussi des caractéristiques spécifiques car chaque ville présente certains indices propre a elle qui font qu’elle soit différente des autres quelques part même si d’une manière générale la fonction de la ville est toujours la même. Pour faire une ville il faut prendre en compte un certains nombre de considérations techniques aussi bien présentées dans bons nombre de documents : choisir sa forme urbaine, penser les réseaux, les transports, l’énergie les déchets et eaux usées, et même d’autre considérations plus actuelles tel que la communication, internet. Construire une ville c’est aussi mettre en place les outils de planification disponible et prenant en compte toutes les composantes de la ville tout en se projetant sur un moyen et long terme. Mais le fait que planifier une ville soit aussi le résultat d’une imagination d’une conception d’un espace de vie amélioré pour le présent et le futur, l’évolution et les changements de notre univers actuel nous impose forcement des recadrages, des réorientations ou même des adaptations de nos politiques urbaines a un moment donné. En ce sens la démarche des autorités de la Cote d’ivoire qui visaient une ville d’un certain standing en matière de politique de l’habitat ne nous semble pas un mauvais choix, car un quart de siècle après, elle a procède a une réorientation de sa politique urbaine tout en prenant bien en compte l’habitat de type « cours » ; encore appelé par le langage populaire « cour commune » : il s’agit d’un espace différencié comportant une partie construite, bâtiment d’habitations et dépendances (sanitaires et cuisines), et un espace libre, généralement au centre de la parcelle appelé cour. Seulement la question foncière pour la pluparts des sociétés Africaines reste un épineux problème ou malgré un certain cadre juridique qui a du mal à être non seulement accepté de tous, pèche aussi gravement dans son application. La spéculation se fait de plus en plus bien au détriment des plus pauvres qui sont obligé de trouver eux même des solutions a leur problème de logement. On pourrait pour conclure dire que la planification d’une ville n’est pas une activité autonome, elle est bien aussi indépendante des facteurs politiques que des changements économiques. Le modèle ivoirien qui a accordé la prépondérance à Abidjan ou d’ailleurs une croissance remarquable s’est développée a favoriser l’émergence d’une typologie d’habitat répondant a un réel besoin. L’habitat de cours non comparable aux bidonvilles misérables de certaines citées latino-américaines ou asiatiques, est une belle illustration de ce que planifier c’est s’inscrire dans une vision d’avenir, vision qui doit être partagée par la communauté. Certes la question du droit a la ville est clairement posée ici, mais en analysant le contexte on ne peut pas faire beaucoup de reproches au modèle ivoirien qui a d’ailleurs eu le mérite de faire d’Abidjan l’une des villes les plus importantes de l’Afrique subsaharienne.
  • @sergeoloumou
    9 years ago
  • @miamindeborah
    10 years ago (last updated 10 years ago)
    Cet ouvrage est l’œuvre de trois chercheurs qui décident après leurs expériences et recherches de mettre ensemble leurs idées et critiques quant au projet d’urbanisation de la ville d’Abidjan qui aux yeux des profanes est en pleine essor. Abidjan sera donc à l’instar des autres villes africaines comme Dakar, Casablanca et autres, Abidjan a été planifiée suivant le modèle européen et à travers cet ouvrage les auteurs mettent l’accent sur un problème que connaissent aujourd’hui de nombreuses villes africaines. Dans les années 80, 70% des ménages à Abidjan considérée alors comme le "petit Manhattan" vivent dans les « cours communes ». Il s’agit d’un jargon abidjanais qui désigne une habitation servant de logement pour plusieurs familles avec cuisine, dépendance et toilettes communes. A travers ce livre, les auteurs retracent les causes de l’échec de la politique de modernisation urbaine mise en place par l’Etat ivoirien après l’indépendance de 1960. Un échec conséquence de trois problèmes majeurs à savoir l’héritage colonial, le phénomène démographique et la corruption. Les auteurs nous montrent à travers cet ouvrage un aspect méconnu à cette époque de la réalité de vie des ménages alors que le pays est en plein essor économique. Au cours de notre lecture critique, nous essaierons de développer suivant les problèmes répertoriés par les auteurs, la ségrégation le lourd héritage colonial et le phénomène démographique. Dès l’introduction de cet ouvrage, de par cette phrase « A trop s’attarder sur le Petit Manhattan, d’ailleurs trompeur, des tours et des immeubles surgissant du Plateau, on finit par occulter une réalité : en 1987 comme en 1963, plus de 7 citadins sur 10 résident dans un habitat dénommé « cour commune » dans le langage usuel », les auteurs suscitent un vif intérêt car suivant notre conception, cette période semblait la plus dorée de la Côte d’ivoire. Pour les auteurs, le projet de modèle urbain mis en place par l’Etat ivoirien après l’indépendance s’est soldé par un échec cuisant qui à la lecture de cet ouvrage, comme sus évoqué est la conséquence de trois problèmes. Nous ne choisirons que de nous étendre sur la ségrégation et le phénomène démographique dans un souci de neutralité. i) A travers cet ouvrage, l’on relève que la politique de ségrégation mise en place dans les années coloniales n’a pas été modifiée puisque les plans d’urbanismes ont été faits sur la base des anciens occultant plusieurs facteurs dont le problème de la fulgurante croissance démographique due non seulement aux personnes venues des zones rurales du pays mais également des pays limitrophes de la Côte d’ivoire ; ii) Le pouvoir étatique, fort de son ambition a basé son plan d’habitat, plus spécialement son projet urbain sur l’homme moyen en ayant pour objectif de faire disparaitre les taudis. Les auteurs remarquent qu’en dépit de cet effort remarquable à cette période, au-delà de « l’apparence inconnue en Afrique occidentale », la ville n’était pas conforme aux normes de modernité et qu’il y existait un écart considérable entre les populations. Un état de fait que nous ne saurons nier dès lors qu’il est généralisé à toutes les villes des pays en voie de développement ; iii) Selon les auteurs, ce choix s’analyse en une ségrégation – de ce que l’on a pu comprendre du moins – la ville d’Abidjan a été le choix d’une bourgeoisie créée par l’époque coloniale qui n’avait pas conscience des intérêts du plus grand nombre, qualifiée de mutation de « bourgeoisie agraire en bourgeoisie compradore » selon Laurent GBAGBO. Une analyse qui soulève le problème du type de ville qu’entendait créer le gouvernement ivoirien à cette période ; iv) Le processus d’urbanisation, en fin de compte, a maintenu sa politique de ségrégation mais à une autre échelle, l’on passe de l’exclusion des africains (pendant la période coloniale) à la création d’une société sélective où seuls les évolués ont droit à un niveau de vie. Si les auteurs relèvent ce fait qui est manifeste dans les grandes villes africaines, il n’en demeure pas moins qu’ils ne définissent pas la notion d’évolués. Doit-elle s’entendre par l’élite ayant des pratiques occidentalisées ? Ou les personnes ayant les moyens financiers ? v) Contrairement à l’analyse des auteurs, il semblerait que la ségrégation se soit imposée à Abidjan. Elle reste certes une conséquence de l’échec du plan d’urbanisation mais elle n’a pas été pensée par le gouvernement ivoirien comme l’était la ségrégation à l’époque coloniale. En effet, Abidjan est devenue dans les années 80 et bien avant un brassage non seulement de plusieurs ethnies des quatre coins de la Côte d’Ivoire mais aussi de plusieurs nationalités. Une croissance et un mélange culturel que les plans n’avaient pas prévu, une situation désolante d’autant plus qu’elle était prévisible quand on sait le passé colonial de cette ville qui était le point d’échange de la sous région ouest africaine ; vi) Cet état de fait peut se comprendre car comme l’ont si bien expliqué les auteurs, l’élément qui pesait plus pour le choix d’urbanisation de la ville d’Abidjan est la croissance rapide, laquelle semblait être le seul moyen que le gouvernement en place a trouvé pour sortir le pays du sous développement. L’on ne peut nier que ce plan avait l’air de bien fonctionner dans les débuts c'est-à-dire avant la croissance fulgurante de la population. Il va sans dire qu’à cette période, même si ce choix de ville, notamment la planification pour les plus riches, reste discutable, il a porté des fruits puisqu’il a permis un essor de la ville qui est devenue la 2ème ville de l’Afrique de l’ouest après Lagos. Abidjan a permis une croissance soutenue jusque dans les années 80 qui avait des répercussions sur la sous région ouest africaine; vii) Cependant, étant donné que les plans d’urbanisme n’ont pas prévu ou ont occulté la possibilité d’une conjoncture vu l’essor économique que connaissait le pays, la ville d’Abidjan prend un coup qui entrainera une baisse du revenu moyen par tête. Et face à cette situation du pouvoir d’achat qui baisse, paradoxalement l’Etat ivoirien doit faire face à un puissant dynamisme démographique, résultante de l’exode rurale et d’une immigration intense ; viii) Selon l’ouvrage, c’est pour palier à cette croissance démographique que l’Etat essaiera de mettre l’accent sur le développement de certaines villes entre autre Yamoussoukro, Bouaké et San Pedro mais Abidjan demeurera le pôle et le centre d’intérêts des populations en zone rurale et des pays limitrophes. Les auteurs semblent de par cette analyse occulter le fait que la croissance démographique ayant entrainé une forte augmentation de l’informalité, les villes comme Bouaké ou Korhogo ont connu également un essor et un développement dès lors qu’elles étaient plus fréquentées par les commerçants qu’Abidjan qui avait à son avantage, reconnaissons le, le port ; ix) Il ressort également de cet ouvrage que l’Etat ivoirien n’avait pas prévu qu’Abidjan devienne un bassin migratoire économique en faisant fi de son passé colonial mais au-delà du gain monétaire, cette population était plus en quête d’un idéal de vie, l’espoir d’une meilleure qualité de vie apparentée par les auteurs à une indépendance loin des coutumes et traditions, référence en est faite au peuple Baoulé. Soit ! Cependant, par cette position, les auteurs n’ont pas semble t il conscience du fait qu’à cette période de l’histoire de la ville d’Abidjan, les mœurs ou autres n’étaient pas plus évoluées à Abidjan qu’ailleurs. Tous les peuples avaient à leurs niveaux des contraintes et traditions quasi identiques. Une autre distinction des peuples est effectuée par les auteurs qui dans un premier temps assimilent à une certaine exclusion le fait que les bénéficiaires de l’habitat économique étaient majoritairement les Akans et Krou au détriment du peuple nordique. Fort heureusement, ils finiront par comprendre qu’il ne s’agissait ni plus ni moins d’une exclusion mais que c’est finalement un choix de vie lié aux habitudes et pratiques de ces différents peuples. Une situation qui, en 2014, bien que plus évoluée en 1985 n’a pas vraiment changée ; x) Encore une fois cet ouvrage démontre qu’une métropole étant un brassage de cultures, l’on ne saurait imposer un modèle spécifique à des peuples ayant des modes de vie différents mais il est préférable de ne pas émettre de jugement de valeur à ce niveau au risque de nous éloigner de notre sujet véritable ; xi) Par ailleurs, un autre aspect bien détaillé dans un ouvrage de cette explosion démographique qu’a connu la ville d’Abidjan dans les années 80, passant de 250.000 Habitants en 1960 à 2 millions, est le problème du logement. Malgré la volonté forte de développement et de promotion sociale dans laquelle s’inscrivait le projet d’urbanisation de la ville d’Abidjan, le gouvernement a dû faire face à des insuffisances et ambigüités du système immobilier. xii) En effet, les auteurs soulèvent tout d’abord le problème de financement des logements sociaux pour lesquels les organismes financiers notamment les bailleurs de fonds, imposaient des contraintes qui malheureusement n’étaient pas bien perçues par les populations habituées à un certain mode de vie. La « cour commune » prend la place donc de l’habitat moyen pour une famille moyenne d’après ce que l’on comprend de cet ouvrage mais les auteurs ne signifient pas que la famille moyenne à l’échelle européenne n’est pas forcément la même en Afrique. Si l’habitat moyen a été conçu à l’origine pour la famille moyenne, le standard d’évaluation est caractéristique de la famille aisée en Afrique. Référons nous pour mieux comprendre au mode d’acquisition de ses logements. xiii) L’accessibilité aux logements sociaux comme il est démontré dans cet ouvrage n’est nullement permise à la population moyenne de cette époque eu égard aux garanties de solvabilité réclamées dès lors que ces foyers ne disposent pas de revenus suffisants. Il n’est pas étonnant que l’on assiste sans surprise à un échec de la politique des logements sociaux et à l’augmentation des bidonvilles et autres logements précaires ; xiv) Un autre problème lié aux logements sociaux qui malheureusement n’a pas été vraiment abordé dans l’ouvrage à notre grand dam est que les populations subsahariennes n’avaient pas à cette période l’habitude de vivre dans des immeubles qui restent des lieux trop restreints ne correspondant pas à leurs pratiques sociales. Pour celles qui peuvent y accéder notamment à ces logements, des problèmes de salubrité finiront par se poser d’autant plus que ces populations n’ont pas été éduquées dans ce sens sans oublier les infrastructures manquantes. xv) Les infrastructures sont un peu le parent pauvre de cet ouvrage car même si les auteurs essaient d’y faire référence, ils restent assez vagues sur le sujet qui est tout de même intrinsèquement lié à celui du logement. En effet, l’accès aux infrastructures est très insuffisant voire quasi inexistant pour une grande partie de la population, la même qui souffre des problèmes d’insalubrité. Des équipements qui auraient dus suivre l’accès aux logements (Ecoles, équipements sanitaires, services de salubrité). Les auteurs tenteront tout de même un parallèle réussi avec le taux de mortalité qui sans grande surprise demeure le plus élevé chez cette grande partie de la population ; xvi) En fin de compte, le projet urbain ivoirien à travers la ville d’Abidjan pour les auteurs ne répond pas aux normes de modernité au vu des distorsions entre ledit projet et la réalité, ce que nous ne contestons pas ; xvii) Cependant, en étant plus objectif, il faut reconnaitre que si l’amélioration de la qualité de vie dans cette ville s’est faite pour une infime partie de la population, ce projet d’urbanisation a eu des avantages même moindres, profitables à toute la population. Aujourd’hui, une trentaine d’années après cet ouvrage, la situation ne s’est pas forcément amélioré semble t il au vu des instabilités politiques dont le pays a fait l’objet cette dernière décennie ; Conclusion: Si l’on doit concevoir un plan d’urbanisation de cette ville, il serait judicieux voire indispensable d’avoir un renversement significatif des choix avec un habitat conforme aux exigences de modernité, de salubrité, une accessibilité aux logements et infrastructures pour tous en prenant en compte le climat économique et les pratiques sociales fortement diluées de nos jours.
  • @rafikhamimi
    10 years ago
    Fiche de lecture - Abidjan "côté cours": pour comprendre la question de l'habitat par Philippe Antoine, Alain Dubresson, Annie Manou-Savina- Editions Karthala Editions, 1987 Cet ouvrage a été rédigé collectivement en 1987 par trois chercheurs qui ont mis en commun leurs connaissances détaillées de la ville d’Abidjan (Histoire urbaine, Habitat, peuplement, plan d’aménagement, flux migratoires…Etc). Il s’agit d’un examen des stratégies des différents acteurs et des alliances qui permet au lecteur de comprendre comment la ville s’est constituée et comment les différents acteurs pensent et font la ville. La ville d’Abidjan, capitale économique de la Côte d’Ivoire, a souvent été présentée dans le discours comme la réplique d’une ville occidentale. En effet, elle a été élaborée et façonnée sur un model d’urbanisme contemporain et venu d’ailleurs comme les villes d’Alger, de Casablanca ou Dakar. Plus qu’une monographie intégrale, ce livre est un travail de recherche qui risque de donner le tournis aux non initiés tant les chapitres sont longs et redondants, le lecteur est emporté dans une sorte de voyage à deux vitesses : le projet moderne que veut mettre en place l’Etat Ivoirien et la ville réelle : la ville des cours où réside sept abidjanais sur dix chiffre qui n’a pas évolué de 1963 à 1987 ! « Un Quart de siècle plus tard, en dépit d’un remarquable effort financier qui à donner la ville une apparence inconnue en Afrique occidentale francophone, force et de constater qu’une contradiction majeure oppose la physionomie abidjanaise aux attendus du projet urbain ». La ville des cours en référence à cet habitat dominant à Abidjan n’est donc pas conforme aux normes de modernité et de progrès imaginés par l’Etat Ivoirien. Pourtant cet "envers" ne peut être assimilé aux bidonvilles que nous nous imaginons (Maghreb et Amériques latines). Produite par des citadins venus soit de l’intérieur ou de l’extérieur du pays dans un but essentiellement locatif, la ville des cours est souvent construite en dur et intègre certains éléments du projet urbain initié après l’indépendance. La densité, le poids démographique de cette "ville des cours", légale ou illégale, posent une question majeure : pourquoi le projet et le modèle d'habitat social moderne, rapidement mis en place par un Etat ivoirien disposant d'importants moyens, n'ont-ils pas donné les résultats escomptés ? Cet ouvrage nous interroge en filigrane sur la question de l’informalité et sur la difficulté et l’impossibilité de mettre fin à ce phénomène. Il est en effet désormais ancré dans les pratiques sociales et nous nous interrogeons à la fin de la lecture du livre sur la nécessité d’intégrer les pratiques informelles dans nos projets urbains et de faire la ville avec cette informalité en l’intégrant dans le projet urbain. Une production foncière dans l’urgence ? La ville d’Abidjan a été bâtie et structurée par le rapport binaire ville administrative et centre des sièges sociaux d’une part et quartiers populaires d’autre part. Elle résulte aussi de grandes opérations d’aménagement, d’urbanisme et de logement sur l’ensemble de l’espace urbain, de l’afflux des ruraux et du développement urbain de la ville qui a été géré de manière pragmatique. On retrouve ainsi aujourd’hui la combinaison d’un certain modèle de ville et de planification urbaine avec un développement relativement « anarchique » et spontané, visible par la présence de nombreux quartiers précaires d’une part et d’autre part par les nombreux conflits fonciers existants. La ville des cours a été le produit de trois processus d’accès à un processus légal par (i) l’accès au lotissement administratif ; (ii) un processus illégal par l’accès à un lotissement privé débuté par les propriétaires coutumiers ; (iii) un processus illégal par l’installation hors lotissement privé ou public, sur des terrains insalubres ou sur des espaces laissés libres dans le tissu urbain existant. La ville légale des cours est celle des lotissements administratifs qui ont pour origine les lotissements sommaires dont la majorité date d’avant l’indépendance, les trames d’accueil mises en place après 1960 et le remodelage par l’administration d’anciens quartiers non lotis ou lotis par des propriétaires privés. La ville illégale est celle créée à partir d’initiatives privées, le plus souvent prises par des propriétaires coutumiers : elle concrétise les entorses au monopole foncier de l’Etat, mais bénéficie de la part de celui-ci d’un laisser-faire, toujours provisoire. Les trois processus, qu’ils soient légaux ou illégaux, ont en commun de répondre au problème-du logement du plus grand nombre dans des délais très rapides. Il en résulte la création d’espaces urbains où la viabilisation est inexistante ou minime. Nous pouvons nous interroger ici sur la question de la planification urbaine et surtout sur le duo planificateur et gestionnaire pour contrôler le foncier et mettre fin à un sous marché légal ou illégal à Abidjan. De plus, l’ouvrage démontre l’émergence d’un acteur majeur dans l’urbanisation de la ville, à savoir les attributaires légaux de parcelles qui se transforment en véritable promoteurs immobiliers. La gestion du foncier est donc un élément fondamental pour la maitrise de l'expansion urbaine car elle a une incidence sur la formation et l'évolution de la ville des acteurs. Ainsi, nous pouvons dire que l’une des pistes à suivre pour mieux gérer et contrôler la gestion foncière serait de mettre fin au laxisme des autorités face aux détournements d’usage d’une grande partie des parcelles qui a fait émergé de véritable marchands de sommeil. La cour, un model Abidjani à accompagner plutôt qu’à détruire ? L’unité du cadre bâti qui permet de loger la majorité de la population d’Abidjan est constituée par ce que le langage populaire a dénommé la « cour commune ». L’habitat sommaire est donc largement représenté à Abidjan. Son extension a été tributaire du bon vouloir des pouvoirs publics qui de temps à autre cherchent à enrayer son développement, comme en 1970 avec la destruction du bidonville de Port-Bouët. Certaines aires d’habitat sommaires ont connu un développement anarchique, mais il n’en existe pas moins une organisation sociale complexe, comme celle rencontrée dans le vaste campement de Koumassi, avec l’existence de rues marchandes, de mosquées et de marchés bien structurés. Le model d’habitat de type « cour » ( ?) est un espace différencié comportant une partie construite, bâtiments d’habitation et dépendances (sanitaires et cuisines), et un espace libre, généralement au centre de la parcelle, appelé la cour. Les unités d’habitation sont construites le plus souvent sur deux des côtés de la parcelle et se font face. Elles se composent d’une série de pièce contiguë sans communication entre elles. Ces pièces constituent des logements occupés chacun par des ménages différents. IL peut-y avoir soit des logements d’une pièce, appelés entrées-couchers ce qui traduit certainement l’inconfort et l’exiguïté du logement, soit plus souvent de logements de deux pièces, chambres-salons. Les dépendances sont construites à l’extérieur des logements, sur les autres côtés de la parcelle. Les cuisines ne sont que des pièces de petites dimensions qui servent à entreposer les fourneaux et à s’abriter pour la préparation des repas en saison des pluies. Le nombre de sanitaires et de pièces cuisines ne correspond pas au nombre des logements. Les dépendances sont donc utilisées communément par l’ensemble des résidents. Dépendances et logements ouvrent sur l’espace libre, la cour. L’organisation du bâti selon une succession de chambres accolées est la forme architecturale la plus simple, pouvant être réalisée avec un minimum d’investissement et permettant de répondre à cette fonction d’accueil. Les superficies des logements, quelle que soit la taille de la parcelle, sont de petites dimensions : l’objectif est de construire le maximum de logements destinés à la location. Par ailleurs, l’analyse globale du fait urbain abidjanais révèle un décalage entre le projet officiel et la réalité, puisqu’en 1985 70% environ des citadins vivent dans l’habitat de type cour, qui constitue toujours l’habitat du plus grand nombre. Conclusion L’exceptionnel effort engagé à Abidjan par les pouvoirs publics pour mettre en œuvre un projet urbain moderne aboutissant à l’élimination de l’habitat produit hors des normes définies par les pouvoirs publics n’a finalement pas abouti à l’endiguement d’un habitat de cour qui regroupe toujours la grande majorité des abidjanais. Cet écart entre la réalité et les attentes ne résulte pas seulement des difficultés à gagner la course de vitesse engagée contre l’impressionnante croissance démographique mais dépend également de la mobilisation des moyens financiers. De nos jours, la nécessité de la formalisation paraît incontestable : un tiers de la population urbaine vit dans la ville informelle. L'étude de la formalisation dans le cadre du marché paraît opportune – comme réponse au déficit qualitatif de logement, en comparaison aux réponses apportées au déficit quantitatif de logement. La Formalisation implique dès lors la requalification de la ville informelle, et, rapidement, devient l’un des principaux modes d’intervention dans la ville informelle. Cependant, légitime-t-elle l’inefficacité du système (production formelle), étant elle-même à l’origine de la ville informelle ?
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