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On the Edge of Reason: Planning and Urban Futures in Africa

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Urban Studies, 43 (2): 319-335 (2006)

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    vor 11 Jahren
    Harrison, P. (2006). On the Edge of Reason: Planning and Urban Futures in Africa. Urban Studies, 43(2), 319–335. Présentation Le texte présenté ici est un article paru en 2006 dans une revue scientifique à comité de lecture : Urban Studies. Il s’agit donc d’un texte de chercheur, revu par les pairs (par d’autres chercheurs de même niveau), qui engage une réflexion théorique sur la planification en Afrique. L’auteur, Philip Harrison, est un chercheur sud-africain affilié à la School of Architecture and Planning, à l’University de Witwatersrand, à Johannesburg en Afrique du Sud. En plus de ses activités de recherche, il est impliqué dans la pratique en étant notamment membre de la Commission sud-africaine pour la planification, mais aussi dans le secteur privé. L’article identifie un problème dans les théories et les pratiques de la planification : elles prennent leur origine dans les théories occidentales, et prennent comme référence (implicite ou explicite) les villes occidentales. Ainsi, quand il s’agit de comprendre et de planifier les villes africaines, on est assez démunis. Une grande partie de la littérature présente les villes africaines en montrant ce qui leur manque (par exemple les industries ou la démocratie), ce qui n’est pas achevé (par exemple la modernité), plutôt que de montrer les processus singuliers et innovants qui s’y déroulent. Cela empêche également de penser la relation entre les villes du Nord (ou occidentales) et les villes du Sud (africaines par exemple) dans le sens inverse : et si les villes du Sud pouvaient être une source d’inspiration pour les villes du Nord ? L’article a donc pour objectif de proposer une nouvelle manière de concevoir et de faire la planification en Afrique. Pour cela, il propose d’utiliser deux ensembles de théories existants : les théories contemporaines de la planification d’une part, et les théories postcoloniales d’autre part. Les théories contemporaines de la planification s’éloignent de la planification dite «traditionnelle». Elle reconnaissent qu’il n’existe pas une seule rationalité, et une seule «vérité» de la planification (la planification moderniste illustre bien cette planification traditionnelle) ; elles reconnaissent ainsi la diversité des rationalités, des aspirations sociales, des cultures dans les villes contemporaines. Cette idée s’applique particulièrement bien aux villes africaines, du fait de leur histoire sociale et territoriale (multiplicité des ethnies, période coloniale, territoire nomade et importance des flux commerciaux et de population, etc.). Les théories contemporaines suggèrent de s’appuyer plutôt sur le dialogue et les consensus entre les citadins, que sur le seul savoir technique du planificateur. Les théories postcoloniales ont mis en évidence que la période coloniale avait marginalisé certaines logiques, qu’il était important de remettre en lumière. Par exemple en matière de planification urbaine, les lois coloniales ont rendu illégales les pratiques d’installation des populations en ville. On les considère toujours aujourd’hui des pratiques «informelles», et en ce sens, on les considère toujours comme inappropriées. Or, pourquoi ne pas les prendre en compte dans les processus de planification ? Finalement, en s’appuyant sur l’exemple de Johannesburg, l’auteur propose l’idée d’une «rationalité transversale» que devrait adopter le planificateur. En d’autres termes, il faudrait que le planificateur soit ouvert à prendre en compte les attentes et les besoins des différents groupes sociaux en présence (par exemple dans le cas de Johannesburg, les acteurs privés internationaux et les populations pauvres). Ces attentes peuvent être contradictoires, mais il s’agit de trouver les points d’intersection, pour atteindre un consensus ou au moins engager un dialogue. Ce n’est parfois pas possible, et l’auteur affirme également que le planificateur doit également pouvoir «trancher» parfois, mais selon un jugement pratique, politique et moral. Discussion L’article présente plusieurs points qui nous semblent particulièrement intéressants pour pousser plus loin les réflexions proposées par le cours de Jérôme Chenal : 1) Le rôle du planificateur : l’auteur montre plusieurs rôles que peut prendre le planificateur. Selon la planification traditionnelle, la planificateur est celui qui détient le savoir technique, et c’est cette rationalité technique qu’il faut mettre en œuvre pour développer une ville. Cette approche a été largement critiquée par des travaux récents, qui mettent en avant l’importance de la dimension procédurale de la planification (le processus compte autant voire plus que le contenu de la planification). Il s’agit d’adopter des approches basées sur la communication, la négociation, le consensus, notamment dans des contextes interculturels. D’autres travaux font la promotion d’une planification «juste», où le contenu de la planification compte à nouveau plus que le processus, mais où le modèle à atteindre est celui de la justice sociale et spatiale, et non celui de la technique parfaite. L’idée d’un consensus au sein de la société est donc encore présent dans cette approche. Ces différents rôles du planificateur nous semblent des repères intéressants à garder en tête, mais ils relèvent de la théorie. Dans la pratique, ces rôles sont souvent mélangés, et selon la situation, on sera plus enclin à l’organisation du dialogue et du consensus, ou au contraire à promouvoir des modèles et des valeurs. Dans tous les cas, la dimension collaborative de la planification semble indispensable aujourd’hui. Elle correspond mieux aux valeurs de démocratie contemporaine, et permet d’intégrer les pratiques informelles. 2) L’auteur soulève un point intéressant, qui est rarement évoqué dans les formations en urbanisme / planification urbaine, mais qui est particulièrement pertinent dans le contexte africain : la dimension éthique de la pratique de la planification. En effet, comme le montre le cours de Jérôme Chenal et l’article, la planification vise à transformer l’espace urbain selon des modèles ou des valeurs. Comment est-ce que ces modèles ou valeurs de référence sont-ils déterminés ? Qui est légitime pour le déterminer ? Comme être sûr qu’on n’exclut pas les plus démunis en élaborant une planification ? Ces questions sont pertinentes pour le contexte africain, car ses villes sont particulièrement fragmentées. On ne peut pas vraiment identifier de classe moyenne ou d’homme «moyen», mais on est plutôt en présence des «extrêmes» : les plus riches et les mieux éduqués ou proches du pouvoir d’un côté ; les plus pauvres et exclus de l’autre. Ces derniers étant souvent les plus silencieux. Or, même l’on veut promouvoir une planification collaborative, basée sur le consensus et le dialogue, il semble difficile de s’assurer que toutes les voix sont représentées. Les dispositifs de participation peuvent être instrumentalisés par ceux qui manient le mieux les institutions, le langue de l’administration (qui n’est souvent pas la langue locale), etc. Même en voulant inclure les plus pauvres, des obstacles très pratiques peuvent se dresser : il peut être difficile de mobiliser les plus pauvres pour recueillir leur avis sur la planification d’un quartier par exemple, parce que dans un contexte d’extrême pauvreté, ces populations vont être plus préoccupées par l’alimentation quotidienne que par l’avenir du quartier ; parce que le temps leur est précieux pour mettre en œuvre les activités génératrices de revenus, etc. Enfin, dans des contextes de tensions ethniques par exemple, les débats peuvent raviver des conflits. Face à de telles incertitudes, l’auteur met de l’avant les notions de «sagesse pratique» ou de «jugement situé». Ce que l’auteur défend, c’est un positionnement intermédiaire du planificateur : ni complètement technocratique, ni complètement naïf face à la capacité des citadins de produire des planifications justes et consensuelles. En d’autres termes, la profession de planificateur garde son utilité ! Conclusion Finalement, l’article renvoie le planificateur à sa propre pratique, et propose une auto-réflexion, une prise de recul par rapport à deux points : le positionnement du planificateur vis-à-vie des citadins, et la dimension éthique de la pratique. L’auteur suggère des notions théoriques intéressantes pour mener cette auto-réflexion, comme par exemple «rationalité transversale», «sagesse pratique», «jugement situé». Il ne faut cependant pas chercher des conseils pratiques directs dans un tel article. Il s’agit plutôt d’un point de départ pour une réflexion, que l’on doit nous même tenter d’appliquer aux situations rencontrées. L’auteur mentionne en fin d’article que ces réflexions sont importantes car les solutions les mieux ancrées dans les contextes locaux (multiples rationalités, valeurs, etc.) sont les plus efficaces. Quelques références concrètes auraient pu nous aider ? Bibliographie Quelques références académiques peuvent être utiles à ceux qui souhaitent poursuivre la réflexion sur les thèmes suivants : Sur le caractère pluraliste des villes et des sociétés africaines (en français) : Chauveau, J.-P., Le Pape, M., & Olivier de Sardan, J.-P. (2001). La pluralité des normes et leurs dynamiques en Afrique. Dans G. Winter (dir.), Inégalités et politiques publiques en Afrique. Pluralité des normes et jeux d'acteurs (p. 145-162). Paris: IRD-Karthala. Mbembe, A. (2013). Sortir de la grande nuit. Essai sur l'Afrique décolonisée. (2e éd.). Paris: La Découverte. Sur l’histoire de la planification dans les pays du sud et en afrique (en anglais) - Jenkins, P., Smith, H., & Wang, Y. P. (Dir.). (2007). Planning and housing in a rapidly urbanising world. New York: Routledge.
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