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Construire avec le peuple

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(1970)

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  • @verolet

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  • @leonore
    8 years ago
    Fiche de lecture Construire avec le peuple, Hassan fathy La bibliothèque Arabe, édition Jérôme Martineau, 1970. En 1973, Hassan Fathy, architecte égyptien (1900-1989) publie l’ouvrage « Construire avec le peuple », qui relate notamment son expérience à Gourna, ville dans laquelle il met en pratique ses idées quant à la construction pour le milieu paysan. Bien qu’écrit il y a plus de 40 ans, l’œuvre est aujourd’hui encore un rassemblement de principes philosophiques et conceptuels qui peuvent largement être appliqués de nos jours, dans un contexte de forte urbanisation. L’auteur, originaire d’une famille aisée, est architecte de formation. Il s’intéresse dès le début de sa carrière à la construction pour les plus démunis, particulièrement dans le milieu rural. Ces recherches le mènent vite à se passionner pour la brique de terre crue. Les coûts de la construction viennent la plupart du temps de l’exportations des matériaux et de leurs acheminement. Ainsi même, dans une construction en terre locale, le bois pour construire la charpente, par exemple, reste le principal investissement. En voyageant, Hassan Fathy redécouvre la maison vernaculaire nubienne et ses voûtes. Tous les éléments des constructions (mur, escalier, toits etc.) ne sont fait que de terre trouvée sur place. Cependant le problème de la mise en œuvre demeure. En effet, les savoirs faire de la construction de ses coupoles s’est perdu au fil du temps et seuls certains maçons savent encore comment s’y prendre. Les trouver et les faire venir sur un chantier est un premier défi qu’il faut relever. Ils peuvent ensuite former d’autres ouvriers aux techniques et de cette manière, faire renaître lentement les traditions oubliées, sous prétexte de la modernité et de la croissance. Hassan Fathy entreprend, au long de sa vie, un long combat pour le retour aux traditions, à la construction en terre, aux savoirs oubliés dans la conception urbaine et architecturale. Pas parce qu’il est nostalgique, mais bien parce que ce type de construction présente des avantages indéniables de coût, de mise en œuvre et de beauté. Que se soit dans la plannification des villes ou villages ou bien dans l’architecture de la maison et du bâtiment public, l’importance est non seulement de donner une habitation à tous, mais qu’elle soit pourvue d’un confort élémentaire, bien disposée et orientée, fonctionnelle, entourés d’espaces publics agréables, et qu’elle soit également belle. La construction de Gourna, détaillée dans l’ouvrage aborde plusieurs points qu’il est important de discuter afin de comprendre les enjeux de cette « construction avec et pour le peuple ». Il s’agit d’abord de remettre Gourna dans son contexte. La ville originale se trouve sur un site archéologique. Les habitants de ce village, paysans à la base, se sont enrichis grâce aux pillages des tombes d’Egypte ancienne. Le département des Antiquités, inquiet, décide de prendre des mesures concrètes, en expropriant les 7000 habitants du site. La question est de savoir comment les reloger. Une compensation ne suffit pas car « Même si on leur versait une compensation suffisante, ils dépenserait tout simplement l’argent en épousant plus de femmes et deviendraient des vagabonds sans le sou » (H.Fathy, Construire avec le peuple). C’est donc avec un devis de seulement 1 million de livre que H.Fathy se voit charger de construire un tout nouveau village à ses milliers de personnes. Pour un faible coût, il prend le pari de la mobilisation des habitants, en coopérations avec les ouvriers plus qualifiés. Plusieurs problèmes sont rencontrés lors de cette expérience. L’architecture en terre face à l’architecture dite « moderne » Dans plusieurs autres expériences de constructions ou reconstruction de zone urbaines, l’architecte dit s’être fait voler le mandat par des architectes d’Etat, construisant au nom de la modernité : Des logements petits, en béton le plus souvent, sur des modèles occidentaux. Les résultats sont des espaces qui ne sont absolument pas adaptés ni à la population, ni au climat et qui de plus, ont coûté beaucoup plus cher. Ces quartiers n’ont fait que répondre aux investissements d’une élite et ne font donc profiter qu’une très petite minorité de la population du pays. Ce qui convient au Caire, ne convient pas forcement à la campagne et il est impossible d’appliquer les mêmes modèles partout, sous prétexte de la croissance économique. L’avantage, et aussi le problème, de la terre cru est qu’elle n’est pas cher. Elle n’intéresse donc pas les autorités avides de profits. Elle ne fait que profiter les pauvres et ce ne sont pas les pauvres qui gouvernent. La bonne volonté des habitants fait la faisabilité du projet Le délogement forcé des habitants en a fait à Gourna, une population réticente au projet de reconstruction. La participation du peuple, moteur du projet, est indispensable dans la construction de la ville. Sans eux, l’idée perd son sens. Cependant, dans un autre contexte et sous d’autres conditions, le peuple peut être beaucoup plus investi. Par exemple, H.Fathy relate la reconstruction d’un village après sa destruction par un incendie. La participation, dans ce cas là, a très bien fonctionné et l’entraide a permis d’ériger rapidement et pour des sommes modiques des toits pour tous. Un des autres problèmes majeur est l’image que véhicule la construction traditionnelle en terre : celle du retour au passé, de la tradition révolue, et même si elle est beaucoup plus adaptée, moins cher, a la possibilité d’offrir des espaces plus grands, plus ventilés et frais, le béton et la vitre sont eux symbole de richesse et de modernité. La question de la mentalité est un énorme frein au développement de ce système de construction et d’organisation du travail, si bien qu’on laisse souvent les gens s’entasser sous des bâches en plastiques dans des conditions insalubres plutôt que de revenir à la tradition ! La formation technique des gens : Une importante organisation Il ne suffit pas de décider que chacun construise sa maison pour que soudainement, le village, organisé et propre, pousse de lui-même. La formation des gens demande une très grande organisation, même si les techniques sont simples et ancestrales. Une hiérarchie doit être établie. Ainsi, pour Gourna, H. Fathy instaure un système de degrés de savoir à 5 niveaux : Le stagiaire, l’apprenti, l’assistant maçon, le maçon et le maître maçon. Les savoirs se transmettent au fur et à mesure pour arriver à un bon équilibre de main d’œuvre qualifiée et non-qualifiée. C’est un système de coopérative qui est mis en place et qui gère le nombre d’homme au travail avec le nombre d’heure pour construire chaque élément. Cette discipline demande un effort de tous les côtés et peut être également un frein à ce type de construction. Aujourd’hui, avec la très forte et rapide croissance démographique urbaine et la volonté de croissance économique, il faudrait des professionnels motivés pour faire face et se battre contre ses autorité qui construisent pour la classe aisée, des bâtiments occidentaux énergivores et des infrastructures inutiles pour la classe pauvre. Pour conclure Hassan Fathy prend ce qui est à sa portée, de la terre et des paysans et le magnifie. Il combine la simplicité et la beauté, fait corps avec sa culture, le relief et le climat et érige ainsi des lieux dignes de l’homme. Même si son projet reste ancré très profondément dans un lieu, le principe est sans aucun doute exportable. Cependant, bien que d’une poésie absolue, il pose également des problèmes d’ordre économique et organisationnel. Ces derniers sont solvables et passent avant tout par un changement de mentalité, en tout cas peut être vers un retour partiel à la tradition qui se souciait si peu de ce qui étaient à la mode et adaptait planification urbaine et architecture aux besoin essentiel de l’homme.
  • @verolet
    9 years ago
    Hassan Fathy - Construire avec le peuple Hassan Fathy est un architecte égyptien, né en 1900 à Alexandrie, il meurt 89 années plus tard dans la ville du Caire, capitale de son pays. Il entreprend dans les années soixante l’écriture de son livre “Construire avec le peuple“ qui paraîtra en 1969 en langue anglaise sous le titre “Gourna, a Tale of two Villages“. Ce livre, comme exprimé dans l’introduction de l’architecte, est dédié aux paysans. Hommes qui habitent les campagnes égyptiennes et qui voient leur savoir traditionnel empiété par les idéaux modernes des grandes villes avoisinantes. Si le but principal de l’architecte est de s’adresser aux paysans, c’est néanmoins “pour ceux qui décident de leur sort“ que Hassan Fathy prend le soin d’écrire son livre. Ainsi, ce sont tous les architectes, urbanistes, sociologues, anthropologue mais aussi tous les politiciens, fonctionnaires et les gouvernements de tout pays qui agissent et s’occupent de l’habitat qui doivent se sentir concerner par ces écrits au sujet du sort et du développement du milieu rural. Si ce livre trouve son utilité plus de quarante ans plus tard, c’est qu’il offre une vision humanisante de concevoir l’architecture. L’ouvrage traite essentiellement de sa vision du métier et de son application dans la réalisation d’un village nommée Gourna pour y loger près d’un millier de familles. Si “construire avec le peuple“ s’ancre dans une atmosphère rurale, c’est toute une réflexion sur la manière d’habiter qu’offre à penser ce livre. En effet, la ville ne peut se concevoir sans sa campagne et inversement la campagne sans la ville car l’un influence l’autre et des liens les connectent. Entre exode rural et, inversement, retour à la campagne, c’est des milliers de personnes qui se déplacent et se meuvent d’un milieu à l’autre. Rêve et Réalité Entre rêve et réalité, ainsi commence la description de l’architecte Hassan Fathy à propos de la campagne. Milieu idéalisé, baigné par le soleil, entouré par la nature et les animaux mais pourtant milieu où il est difficile d’y vivre, la pauvreté y étant bien installée. Ses motivations naissent ainsi du désir de changer la situation du milieu rural en améliorant les conditions de vie de ses habitants, notamment à travers un habitat digne et beau. C’est à travers de l’amour pour cette campagne qu’oeuvrera l’architecte, convaincue que le seul changement possible doit venir de l’intérieur et non pas des grandes directives lancées par un bureau du Caire. L’homme, la société et la technologie Hassan Fathy développera dans la seconde partie de son ouvrage un œil critique face à l’architecture moderne des années 1920 et à son influence dans la conception du caractère architectural en Afrique, notamment en Égypte. En effet, il dénonce le poids de la modernité sur la tradition et la perte de caractère, d’identité de l’architecture égyptienne, essentiellement au sujet de l’architecture civile. Les paysans recherchent un modèle de modernisme afin d’obtenir l’image d’un niveau de “développement“ similaire aux citadins. Ainsi, au lieu d’exploiter leurs ressources, leurs savoirs, comme par exemple celui de la maison à cours intérieure ils bâtissent avec des matériaux et une façon de construire qu’ils ne connaissent ni ne maîtrisent. Selon Hassan Fathy, la modernité ainsi corrompt la tradition authentique et le manque de poids de la tradition induit inévitablement l’édification de villages laids. Hassan Fathy prend le soin d’expliquer la nature profonde de la tradition car la tradition évolue, se modifie, s’enrichit, elle n’est pas statique. La tradition est l’aboutissement de l’expérience pratique de maintes générations face à un même problème. Ainsi, la tradition est comme une solution trouvée puis réutilisée. Hassan Fathy compare le rôle de la tradition dans le domaine de l’art aux habitudes dans le domaine de la vie quotidienne. Ainsi, comme pour les habitudes, la tradition a pour but de « dégager l’artiste des décisions mineures et accessoires pour lui permettre de concentrer son attention sur les décisions vitales.» Selon l’architecte Hassan Fathy, l’innovation doit être la réponse, profondément pensée à un changement des circonstances. L’idéal ne naît pas toujours du changement comme pourraient le faire croire les idéaux de la modernité. C’est dans ce sens qu’Hassan Fathy œuvre et lutte pour réintroduire la notion de tradition dans l’architecture, dans la construction. Bien plus que la réintroduire, le but principal est de la revaloriser afin de démontrer ses avantages et ses qualités aussi bien esthétiques qu’humaines. En décrivant le processus de la conception et de la réalisation du village Gourna en Égypte, Hassan Fathy cherche à démontrer l’efficacité de l’usage de la brique de boue et la nécessité de la réinsertion du trio : propriétaire, architecte et artisan. Pour lui, il est essentiel que ces trois acteurs aient un rôle à prendre dans la création et la réalisation du projet. Le propriétaire, ici les habitants, afin d’informer de leurs besoins et de leurs attentes pour leur propre habitat et l’artisan pour partager son savoir-faire, sa main constructrice et créatrice. Hassan Fathy, à travers son livre, cherche à responsabiliser tous ceux qui ont un rôle à jouer dans la construction du cadre de vie d’une population, d’un individu. En effet, il décrit l’importance des décisions de l’homme et leur poids. Une décision pouvant avoir de grandes conséquences. Dans un contexte africain contemporain où le poids de modèles hérités de pensées européennes est conséquent, il serait judicieux de repenser au rôle de la tradition pour ce continent et de sa revalorisation afin d’en tirer tous les bénéfiques possibles. Ce livre nous interpelle sur le rôle de l’architecte et de son architecture. Les réflexions portées sur le monde rural se transposent aisément pour la ville. Pour qui construisons-nous ? Pour qui planifions-nous la ville? Dans cette conception quel est le rôle de ses habitants ? Comment peuvent-ils faire partie du projet ? Quel est le rapport de l’architecte avec les constructeurs, les artisans ? Une meilleure harmonie et collaboration entre ses différents acteurs pourrait-elle être la solution pour une meilleure qualité et efficacité de construction ? C’est ainsi, selon les idéaux de l’architecte Hassan Fathy, qu’il serait juste et préférable d’emprunter cette voie afin d’envisager une meilleure façon d’habiter le monde. “ Un homme ne peut pas construire une maison, mais dix hommes peuvent construire dix maisons très facilement, même une centaine de maisons. Nous devons soumettre la technologie et la science à l'économie des pauvres et des sans argent. Nous devons ajouter le facteur esthétique. “ Hassan Fathy, Discours d'acceptation du prix Nobel alternatif, décembre 1982
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