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La ville en Afrique noire

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(1983)

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  • @bolop
    @bolop 9 years ago
    Référence d'entetiens avec Jean-Marc Ela par Yao Assogba, 1999: http://classiques.uqac.ca/contemporains/assogba_yao/jean_marc_ela/jean_marc_ela.html
  • @bolop
    9 years ago
    1) Présentation du contexte de publication de l’ouvrage L’œuvre de Jean-Marc Ela et plus particulièrement son livre « La ville en Afrique noire » ont été écrits dans le contexte de l’extraordinaire croissance des villes africaines depuis les années 60. La population urbaine y croit à un rythme beaucoup plus élevé que la population rurale, alors que les campagnes peinent à nourrir leur population. Les centres urbains, comme le souligne l’auteur, sont les lieux où se concentrent les décisions qui affectent également les populations paysannes. La crise de la société africaine tiendrait dans le rapport entre la ville et la campagne. Après que l’intérêt était surtout porté sur l’Afrique traditionnelle et l’exploration de ses territoires, vers la fin des années 60 les processus de transformation de la société africaine ont commencé à être étudiés. La ville est alors considérée comme le révélateur des changements des rapports sociaux traditionnels. Dès les années 70, les chercheurs francophones s’intéressent fortement aux études urbaines dans le contexte de ces bouleversements de société. Auparavant ce domaine était surtout l’apanage des Britanniques. Jen-Marc Ela est un auteur et prêtre camerounais né en 1936. Il a suivi des études de théologie à Paris et de sociologie à Strasbourg avant de retourner en Afrique pour enseigner. Il s’est exilé au Canada pour les treize dernières années de sa vie (décédé en 2008). Des menaces pesaient sur lui à cause de ses critiques de l’Eglise et du pouvoir politique camerounais suite à l’assassinat du père Mveng en 1995. Il est un auteur prolifique et ses livres sont connus en Afrique. Il a beaucoup écrit sur la société, la gouvernance, la religion et le développement de l’Afrique 2) Thèmes principaux de l’ouvrage et message de l’auteur Jean-Marc Ela replace tout d’abord la ville africaine dans son contexte des années 80. Il y parle de l’ « explosion urbaine » engendré par le fort taux d’urbanisation du continent pourtant le moins urbanisé. La croissance démesurée des villes est fortement liée à l’exode rural, dû aux disparités économiques grandissantes entre ville et campagne. Il plante le décor en évoquant les différences entre modèle traditionnel et vie urbaine, laquelle est perçue comme une opportunité de « réussir » rapidement. Ensuite certains défis propres à la ville sont abordés. Parmi ceux-ci, la thèse de la ville africaine comme une ville de Blancs où les Noirs sont dominés est particulièrement développé. S’ensuit la problématique de l’habitat précaire, du difficile accès à l’eau et du chômage. L’intégration à la vie citadine pour un nouvel arrivant en milieu urbain fait également l’objet d’un chapitre. On y lit que, au contraire des villes européennes, une certaine solidarité et la persistance d’une certaine structure villageoise à la ville peut favoriser l’intégration. Cependant, selon l’auteur, la ville africaine est également source de dépendance, dans le sens où la population, et les jeunes surtout, sont pris dans des engrenages auxquels ils n’arrivent plus à échapper, notamment en acceptant des postes ne leur permettant pas de se développer comme ils le souhaiteraient. Jean-Marc Ela conclut son livre en proposant des solutions au « mal urbain ». Par exemple en assainissant les bidonvilles, en améliorant la collecte des déchets ou rendant les transports publics plus efficaces. L’auteur insiste sur la nécessité de rompre l’hégémonie de la capitale tentaculaire. Cela peut se faire en décentralisant et en développant les villes moyennes pour décongestionner les grandes agglomérations. Qui de mieux que Jean Marc Ela lui-même pour s’exprimer sur son livre dans un entretiens réalisé par Yao Assogba et publié en 1999. Voici ce qu’il dit à propos de l’idée centrale du livre « La ville en Afrique noire » : Je veux contribuer à la réflexion sur le défi urbain de l'Afrique. La ville est le lieu de pouvoir. À cet égard, si l'on veut comprendre l'urbanisation en Afrique, il faut s'interroger sur la façon dont l'État postcolonial gère le rapport à l'espace. Bien plus, on retrouve dans la ville elle-même un système de domination qui nous relie au capitalisme international. Et la ville prend d'autant plus d'importance qu'elle est le lieu où l'État réactualise le modèle colonial de ségrégation dans un contexte où l'urbanisation est le fruit du sous-développement des campagnes. Ce livre amorce la réflexion sur les politiques urbaines inséparables des politiques de développement. Moderniser la ville ne consiste pas à faire déguerpir les gens qui s'installent dans les bidonvilles ; la véritable solution aux problèmes urbains, c'est le développement des campagnes. Il faut revaloriser les villes secondaires et désacraliser la capitale en redistribuant la carte du pouvoir. 3) Discussion et conclusion Il faut bien avoir conscience que ce livre doit être replacé dans le contexte de son époque. Dans les années 80, l’Afrique est considérée comme faisant partie du Tiers-monde, et beaucoup de pays sont encore jeunes puisqu’ayant acquis leur indépendance quelques années auparavant. La discrimination et la séparation raciale y sont encore très présentes. Cela se sent dans les thèses de Jean-Marc Ela décrivant la ville comme espace de la domination par l’Européen. Dans ces circonstances, on peut comprendre l’alarmisme de l’auteur sur la situation peu enviable de l’Afrique, représentée par le développement anarchique de la ville et les mirages qu’elle est pour les gens en quête d’un avenir meilleur. Aujourd’hui quelques années plus tard, bien des défis posés par la ville africaine demeurent. Dans le cours sur les villes africaines proposé par l’EPFL, certaines pistes pour une amélioration de la condition urbaine en Afrique (par ex. la restructuration des bidonvilles ou certaines méthodes et outils d’aménagement) auraient certainement pu redonner une touche d’optimisme à Jean-Marc Ela.
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