Abstract

L’expérience douloureuse constitue un lieu de réflexion privilégié pour interroger les relations entre corps et esprit, sensation et pensée, matière et sens. Appuyée sur les notions actuelles des neurosciences, une lecture anthropologique de la douleur invite à dépasser l’approche psychosomatique de la relation corps-esprit pour considérer que notre expérience du monde, dans ce qu’elle suppose de plus physiologique, participe déjà d’une activité symbolique. Les travaux précurseurs de René Leriche sur la chirurgie de la douleur, relus à travers la théorie de sélection des groupes neuronaux de Gérald Edelman, permettent de penser l’inscription du symbolique au cœur même du biologique, sans pour autant réduire le symbolique au biologique. Ainsi, l’activité symbolique ne concerne pas uniquement le psychisme : le corps est déjà du sens et non uniquement un lieu neutre, objectif, où l’esprit projetterait du sens. Cette lecture anthropologique du phénomène douloureux suggère une autre approche de la question corps-esprit, non plus dans les termes dualistes de la psychosomatique mais en termes de physiosémantique (Le Breton, 1995) pour signifier l’enracinement corporel de notre condition humaine.

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