Abstract
Les perspectives féministes connaissent depuis une vingtaine d'années
un développement considérable dans le champ académique anglo-saxon.Si
les analyses en termes de genre sont désormais connues du public
français, l'idée de care - mot habituellement traduit par soin, attention,
sollicitude - n'a pas trouvé un accueil aussi évident. Les publications
américaines sur l'éthique du care et ses rapports avec l'éthique
de la justice ayant été comparées, non sans quelque sarcasme, à une
véritable industrie, l'indifférence des milieux académiques et des
féminismes français vis-à-vis d'un mouvement intellectuellement aussi
important est étrange.Le moment semble donc venu de présenter l'éthique
du care, et de mettre en évidence les raisons d'une telle résistance.
C'est bien la dimension provocatrice de l'idée même d'une éthique
du care qui la rend difficilement assimilable, et vulnérable. En
réintégrant dans le champ des activités sociales significatives des
pans entiers de l'activité humaine négligés par la théorie sociale
et morale, ces approches ébranlent la partition entre des registres
habituellement disjoints.Les questions triviales posées par le care
-qui s'occupe de quoi, comment ? -font appel à une anthropologie
différente comprenant dans un même mouvement la vulnérabilité, la
sensibilité, la dépendance. Elles mettent en cause l'universalité
de la conception libérale de la justice, installée en position dominante
dans le champ de la réflexion politique et morale, et transforment
la nature même du questionnement moral.
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